« Paradoxalement, plus les supports de transmission se dématérialisent, moins il y a de place pour les immatérialités sociales soit l’imaginaire social. »
Régis Debray, Vie et mort de l’image en Occident, 1992
Pour ce projet photographique, j’ai choisi de passer par l’intermédiaire du rêve et de l’imaginaire afin de mettre en place un travail collaboratif avec les usagers d’ « Aude Urgence Accueil ».
Je suis parti à leur rencontre afin d’échanger sur leurs aspirations et de tenter de mettre en lumière leurs futurs, fantasmés à partir d’une réalité souvent abrupte.
Alors que de nombreux éléments freinent nos échanges (la langue, la culture, les castes sociales...) arrive l’art.
L’art qui permet à chacun de se créer un monde dans lequel se réfugier, prendre confiance et communiquer.
La photographie est un outil de création de lien social, elle m’a permis d’aller vers toutes ces personnes et de fonder un projet commun. J’ai désiré offrir à chacun la faculté de s’exprimer devant et derrière l’appareil photographique, avec
pour objectif de partager la diversité des regards qu’ils portent sur la vie.
Ces images montrent une réalité modelée par des rencontres humaines où chacun d’entre nous a échangé sur le monde tel qu’il le sent, le monde tel qu’il le voit.
L’ensemble de ces photographies rend compte d’une expérience humaine intense où, écoutes et échanges, ont été les fondements d’une création, de créations qui tentent de nous questionner sur nos préjugés ainsi que sur nos enfermements dans des postures sociales qui paraissent souvent non miscibles.
Remettre en cause pour quelques instants le pessimisme affiché de Régis Debray n’en n’était pas le moindre pari.Peut-être que prendre son temps et le passer avec l’autre répondrait-il au mieux à ce paradoxe.
Tous responsables du monde dans lequel nous vivons, nous montrons à ceux que nous rencontrons la place importante qu’ils occupent à nos yeux, poussons-les, prenons du temps avec eux,qu’ils s’expriment.
Allons contre l’apathie d’une humanité enchaînée, contrainte en silence à faire comme on le lui dicte !
«Quand je fais des photos je n'ai plus de problème.»
Mimouna
«Faire ces photos, c'est comme être quelqu'un d'autre?
Apprendre à faire des photos a changé mon regard sur la ville.»
Idriss
«Quand je fais des photos j'ai l'impression d'être un touriste
dans ma propre vile.»
Maurice
«Quand je regarde les photos je me sens mieux, je me sens
bien!»
Baseer
«C’est la première fois que je touche
un appareil photo.
Je me souviens de ces moments de
partage et cela me donne envie de
continuer.
Grâce à la photo avec le camion, j’ai
envie de faire comme mon père en
Guinée, devenir camionneur.»
Yakhouba
Photographies tous droits réservés, Léo Derivot